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Cours

Emmanuel Kant
1724-1804


Eléments de biographie

Kant est né à Königsberg (Prusse orientale) en 1724, dans une famille modeste. Il ne quittera jamais sa ville natale.

Il reçoit une éducation piétiste.

Après des études de théologie et de philosophie, il devient précepteur en 1746.

Il est nommé professeur titulaire à l'université de Königsberg en 1770. Il donne des cours de science, de logique, de métaphysique, de théologie, d'anthropologie et de pédagogie.

En même temps, il développe sa recherche personnelle jusqu'à la publication tardive de ses grandes oeuvres : en 1781, alors qu'il a presque 60 ans, paraît la Critique de la raison pure ; en 1788, la Critique de la raison pratique ; enfin, en 1790, la Critique de la faculté de juger.


Thèmes majeurs

La critique

Pourquoi une "critique" de la raison est-elle nécessaire ?

Sur ces problèmes fondamentaux que sont l'existence de Dieu, l'immortalité de l'âme, et la liberté, il n'existe aucun accord entre les philosophies. D'où la nécessité d'une critique, qui serve de tribunal devant lequel la raison elle-même pourrait juger ses prétentions et reconnaître ses limites. Seule l'entreprise critique peut éviter que la philosophie s'épuise en vaines querelles, et que le scepticisme d'un Hume triomphe.

L'anthropologie philosophique

Les trois grandes questions critiques auxquelles Kant tentera de répondre sont :

Trois questions qui se ramènent à une seule : Qu'est-ce que l'homme?
En ce sens, la philosophie de Kant est une anthropologie philosophique, c'est-à-dire une réflexion sur la condition humaine.

Que puis-je connaître ? Les phénomènes.

Nous ne connaissons pas les choses telles qu'elles sont en elles-mêmes indépendamment de nous (les choses en soi ou "noumènes") , mais seulement les choses telles que nous les présente notre faculté de connaître (les choses pour nous ou phénomènes).

Ainsi, contrairement au scepticisme de Hume, Kant pense qu'il est possible d'atteindre la vérité dans les sciences. Si la connaissance est possible, c'est que les objets se règlent d'une part sur les concepts a priori de notre entendement (ex. : le concept de causalité) et d'autre part sur les formes a priori de notre sensibilité (l'espace et le temps). ("A priori" c'est-à-dire indépendant de l'expérience). Ainsi, le temps et l'espace ne sont pas des propriétés réelles des choses, mais des formes de l'intuition qui conditionnent la perception que nous en avons. Dans la connaissance, ce n'est pas le sujet qui s'adapte à l'objet, mais l'objet qui s'adapte au sujet. C'est un changement de perspective analogue au passage du géocentrisme à l'héliocentrisme en astronomie. D'où le nom de "révolution copernicienne" donné par Kant lui-même à cette nouvelle conception de la connaissance.

La philosophie critique de Kant se situe entre l'idéalisme qui fonde la connaissance sur la seule raison et l'empirisme qui la fonde sur l'expérience.

Contre les empiristes, Kant affirme que si toute connaissance commence avec l'expérience, elle ne dérive pas toute de l'expérience. En effet, connaître un objet, c'est d'une part l'appréhender dans l'espace et le temps qui sont des formes qui appartiennent à la sensibilité du sujet et non à l'objet, et d'autre part lui appliquer des concepts qui appartiennent à l'entendement du sujet et non à l'objet. En cela, Kant donne raison aux idéalistes : la connaissance ne dérive pas entièrement de l'expérience.
Cependant, contre les idéalistes, Kant affirme qu'il n'y a pas non plus de connaissance sans intuition sensible, et en cela, il donne raison aux empiristes.

L'objectivité résulte donc de la structure du sujet connaissant, ce qui à la fois rend possible une connaissance de l'expérience et justifie la prétention à la nécessité et à l'universalité des lois expérimentales, mais limite cette connaissance à ne saisir que des phénomènes, c'est-à-dire les choses telles qu'elles nous apparaissent et non telles qu'elles sont en soi.

En contrepartie, les objets de la métaphysique traditionnelle (l'âme ou le moi, Dieu, le monde, la liberté) ne peuvent pas être connus puisqu'ils sont de pures idées sans intuition sensible. Ainsi, il ne saurait y avoir de preuve de l'existence de Dieu. Telles sont, établies par la critique, les limites de notre jugement, incapable de produire une connaissance solide dès qu'il se prive de l'appui de l'intuition, laquelle ne peut être pour nous que sensible.

Les conflits historiques de la métaphysique sont donc des illusions produites par l'usage illégitime d'une raison ignorante de ses propres limites.

Que dois-je faire ? mon devoir.

Leur réduction critique dans le domaine théorique, celui de la connaissance, ne signifie pas que les Idées de Dieu, de l'âme, et de l'univers soient données à la raison seulement pour la faire divaguer. Son échec à connaître le suprasensible par un usage théorique de ses Idées, indique que la raison doit trouver une autre voie que celle de la connaissance pour satisfaire ses aspirations : cette voie sera celle de l'usage pratique de la raison, la morale, que Kant expose dans la Critique de la raison pratique publiée en 1788. L'usage de ces Idées est légitime lorsqu'il est pratique : Dieu, l'âme, et le monde ne sont pas des objets à connaître mais des postulats qu'il faut admettre pour diriger et donner sens à notre vie pratique. Ces postulats sont

  1. la possibilité de la liberté dans le monde qui donne un sens à la notion de volonté autonome;
  2. l'immortalité de l'âme et l'existence de dieu qui justifient la possibilité, dans l'au-delà, d'une réconciliation entre vertu et bonheur.

Car la quête d'un bonheur terrestre est incompatible avec l'exigence morale.

Le passage de la philosophie de la connaissance à la philosophie pratique a pour conséquence de modifier l'approche des Idées de la Raison : elles ne constituent plus désormais des objets de connaissance (échec de la métaphysique traditionnelle), mais des guides pour l'action.

En morale, la raison se donne à elle-même ses propres règles (autonomie). Être moral, c'est faire son devoir, c'est-à-dire respecter les règles que l'on s'est données. Ces règles sont des impératifs catégoriques c'est-à-dire inconditionnels ("tu dois faire cela" et non "si tu veux obtenir, ceci, fais cela"). Pour pouvoir être inconditionnel, un impératif moral doit être universalisable.

Le premier grand impératif catégorique qui fonde tous les autres est donc :
Agis toujours de telle sorte que la maxime de ton action puisse être érigée en loi universelle, c'est-à-dire que tu puisses en même temps vouloir que tout le monde partage la même maxime que toi.
L'impératif "Tu ne tueras pas ton prochain" est une telle maxime, mais pas "Tu tueras ton prochain". En effet, je peux vouloir tuer, mais je ne peux pas vouloir en même temps que tout le monde tue tout le monde.

Le deuxième impératif catégorique pose la valeur inconditionnelle de toute personne :
Agis toujours de telle sorte que tu traites l'humanité en toi comme dans les autres toujours aussi comme une fin, jamais simplement comme un moyen.
L'homme en tant que personne possède une dignité qui l'élève au dessus de toute chose.

Que m'est-il permis d'espérer ? que le déterminisme naturel soit compatible avec l'affirmation de la liberté.

De cela, il n'y a pas de preuve, mais seulement des indices dans l'expérience de la finalité dans l'Art et dans la nature. Tout se passe comme si le monde obéissait non seulement à des causes, mais aussi à des fins. Le monde aurait un sens pour nous, ce qui veut dire que malgré tout, et même malgré nous, les fins de la nature coïncideraient avec celles de l'humanité. Le plaisir désintéressé et spontané provoqué par l'expérience de certaines formes sensibles dans l'expérience esthétique serait pour Kant le signe de cette réconciliation possible.

Qu'est-ce que l'homme ? L'homme est un animal qui a besoin d'un maître.

L'homme est caractérisé par une "insociable sociabilité" qui fait qu'il ne peut vivre sans ses semblables, mais qu'il a toujours tendance à abuser de sa liberté vis-à-vis d'eux. Il faut donc un maître pour le contraindre à réaliser son potentiel moral et à sortir de l'animalité pour devenir une personne.

Mais le maître étant lui-même un homme, c'est-à-dire un animal qui a besoin d'un maître, ce n'est qu'au terme d'un long processus historique que l'on peut espérer voir s'établir ce que Kant appelle le "règne des fins", un état politique permettant l'instauration d'un ordre moral.


Principales oeuvres

Pour en savoir plus

Encyclopédie Wikipédia